Conseil constitutionnel : le RIP des retraites encore rejeté ?

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[Mis à jour le 3 mai 2023 à 11 heures] Validée ou rejetée ? La seconde demande de référendum d'initiative partagée (RIP) sur la réforme des retraites semble avoir peu de chances d'aboutir. Le Conseil constitutionnel doit rendre sa décision sur le projet déposé par les députés socialistes ce mercredi 3 mai en fin de journée. L'objectif est simple : maintenir l'âge de départ à la retraite à 62 et non à 64 ans comme le prévoit la réforme des retraites. Les Sages ont déjà mis en échec la première tentative de RIP le 14 avril jugeant que la demande des élus de la gauche ne relevait pas d'un "changement de l'état du droit", c'est-à-dire d'une réforme. La loi n'ayant été promulguée que la soirée du 14 avril, au moment de l'examen du premier RIP l'âge de la retraite était toujours fixé à 62 ans et la demande visait à maintenir le statu quo, pas à modifier le droit. Or, c'est à cela que doit servir le RIP.

La réforme des retraites désormais entérinée, le second RIP peut-il espérer être validé ? En plus de la demande concernant le recul de l'âge de départ à la retraite qui est restée quasi identique entre les deux textes, les élus auteurs du RIP ont ajouté un deuxième article plus financier portant l'affectation des revenus de la CSG à la branche "vieillesse" de la Sécurité sociale. Un ajout qui constitue "un élément de réforme" selon l'analyse du sénateur socialiste Patrick Kanner auprès de l'AFP.

Pourquoi le RIP peut-il être rejeté par le Conseil constitutionnel ?

La deuxième demande de référendum d'initiative partagée pourrait échouer pour les mêmes raisons que la première, à en croire Thibaud Mulier, maître de conférences en droit public à l'université de Nanterre interrogé par franceinfo. "La première proposition de loi ne constituait pas une réforme au sens de l'article 11 de la Constitution (article qui pose les conditions de validité d'un RIP, ndlr). Si on suit la logique du Conseil constitutionnel, et puisque la nouvelle formulation de l'article premier est quasiment identique, on va retomber sur le même problème", a estimé le spécialiste. Pourtant, la temporalité diffère : cette fois, la loi sur la réforme des retraites a bien été promulguée lors de l'examen du RIP. Mais pour cette raison, une autre difficulté pourrait être rencontrée, car le RIP ne doit pas avoir "pour objet l'abrogation d'une disposition législative promulguée depuis moins d'un an". 

Quant à l'article 2, son ajout ne serait pas suffisant pour garantir la validation du RIP par les Sages ? Pas vraiment. A la différence des projets de loi ordinaires, les référendums d'initiative partagée doivent être jugés constitutionnels dans leur ensemble et ne peuvent être censurés partiellement. "Puisque le premier article de la proposition est inconstitutionnel, l'ensemble de la proposition l'est", avance Thibaud Mulier anticipant la possible explication du Conseil constitutionnel.

Et si le Conseil constitutionnel valide le RIP ?

Si le Conseil constitutionnel décide de valider la demande de référendum d'initiative partagée alors un long processus se mettrait en place. Le texte des élus de gauche et du centre prônant le maintien de l'âge de départ à la retraite à 62 ans devrait être signé par au moins 4,88 millions de personnes (soit 10% des électeurs français) dans un délai de neuf mois. Cette deuxième étape validée, le texte serait de retour au Parlement pour être examiné et voté par l'Assemblée nationale et le Sénat dans les six mois. Passé ce délai si aucun vote n'a eu lieu, le président de la République serait obligé d'organiser un référendum sur le texte. Beaucoup d'étapes qui ne garantissent pas la réussite du RIP même en cas de validation du texte par le Conseil constitutionnel.

Pourquoi le Conseil constitutionnel a-t-il rejeté le premier RIP ?

"À la date de l'enregistrement de la saisine, la proposition de loi visant à affirmer que l'âge légal de départ à la retraite ne peut être fixé au-delà de 62 ans n'emporte pas de changement de l'état du droit" a justifié le Conseil constitutionnel, le 14 avril, après avoir rejeté le texte. Et d'ajouter que "lorsque le Conseil constitutionnel est saisi d'une loi de financement rectificative de la sécurité sociale, il lui revient uniquement de contrôler qu'elle comporte les dispositions relevant du "domaine obligatoire", et de vérifier que les autres dispositions ne sont pas des 'cavaliers sociaux'."

L'institution présidée par l'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius n'a pas suivi les parlementaires de gauche ou du Rassemblement national, qui avaient plaidé un détournement de procédure parlementaire pour faire adopter la loi. Elle a néanmoins évoqué le "caractère inhabituel" de l'accumulation de procédures visant à restreindre les débats à l'Assemblée nationale et au Sénat.

La réforme des retraites validée par le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a rendu ses décisions sur la constitutionnalité de la réforme des retraites, le vendredi 14 avril. Il a partiellement censuré le texte, en retoquant six "cavaliers sociaux", dont celui sur l'index sénior, qui devait être obligatoire dès cette année pour les entreprises de plus de 1.000 salariés, et dont la non-publication devait être passible de sanctions. L'article sur le CDI sénior a également été censuré, qui devait faciliter l'embauche des demandeurs d'emploi de longue durée de plus de 60 ans. Néanmoins, la mesure la moins populaire de cette réforme des retraites, l'article 7, sur le recul de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans, a été validée par les Sages.

À la suite de la décision du Conseil constitutionnel, Élisabeth Borne a estimé qu'il n'y avait eu "ni vainqueur, ni vaincu". Et d'ajouter que le texte arrivait "à la fin de son processus démocratique." Pourtant les opposants à la réforme des retraites s'est faite entendre, tant du côté des politiques que celui des syndicats. "Ce n'est pas fini", a déclaré Sophie Binet, la nouvelle secrétaire de la CGT, au nom de l'intersyndicale, convaincue que ne pas promulguer la loi est le "seul moyen de calmer la colère (...) dans le pays". Le président "ne peut pas gouverner le pays tant qu'il ne retire pas cette réforme", a-t-elle ajouté.

"La lutte continue", a déclaré le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon, qui a dépeint un Conseil constitutionnel "plus attentif aux besoins de la monarchie présidentielle qu'à ceux du peuple souverain". De son côté, Marine Le Pen a estimé que "le sort politique de la réforme des retraites n'est pas scellé. Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, le Parti socialiste a, quant à lui, indiqué qu'il déposera une proposition de loi d'abrogation de la réforme des retraites".



source https://www.linternaute.com/actualite/politique/2873310-conseil-constitutionnel-le-rip-des-retraites-encore-rejete/
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